Élément d’équipement dissociable de l’ouvrage et garantie décennale

Cour de cassation

Par sa décision du 7 novembre 2019 (n° de pourvoi 18-18.318), la troisième chambre civile de la Cour de cassation a de nouveau illustré la possibilité de réclamer l’application de la garantie décennale suite à des dommages sur un élément d’équipement dissociable si son dysfonctionnement affecte l’impropriété de l’ouvrage dans son ensemble.

Installation de ventilation défectueuse

Dans cette affaire, un couple a fait construire une maison d’habitation nécessitant naturellement des travaux de plomberie, sanitaire, ventilation, mais aussi un chauffe-eau solaire et une cuve de récupération d’eaux de pluie. Se plaignant de dysfonctionnements, le couple a assigné le concepteur, le réalisateur et leurs assureurs en paiement du coût de reprise des désordres et en indemnisation de leurs préjudices.

Dans un premier temps, la Cour d’appel a rejeté les demandes du couple au titre des désordres affectant l’installation de ventilation au motif que le rapport d’expertise n’établissait pas que « le démontage ou le remplacement des installations ne pourrait pas s’effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière des ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert de l’ouvrage principal. » Ainsi, selon la Cour d’appel, l’installation de ventilation ne pouvait être regardée comme un élément d’équipement indissociable soumis à garantie décennale au titre de l’article 1792-2 du Code civil.

Dysfonctionnement rendant potentiellement l’ouvrage entier impropre à sa destination

Mais la Cour de cassation a annulé cette partie du jugement en estimant que la Cour d’appel n’avait pas recherché si « les désordres affectant l’installation de ventilation ne rendaient pas l’ouvrage, dans son ensemble, impropre à sa destination. »

Plus simplement, même si l’installation de ventilation est dissociable de l’ouvrage principal et n’entre théoriquement que dans le champ de la garantie biennale, elle peut être soumise à la responsabilité décennale de son installateur si son dysfonctionnement rend l’ouvrage entier impropre à sa destination.

Qu’est-ce qu’un élément d’équipement dissociable ?

La notion d’élément d’équipement dissociable est d’abord établie au regard de la notion d’élément d’équipement indissociable définie à l’article 1792-2 du Code civil. Ainsi, dans cet article, l’élément d’équipement indissociable est défini comme tel « lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s’effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage. »

→ La dépose, le démontage ou le remplacement d’un élément dissociable doit donc pouvoir se faire sans détérioration ou enlèvement de matière de l’ouvrage principal.
À noter que, pour bénéficier de la garantie de bon fonctionnement, l’élément dissociable doit avoir été installé en même temps que l’ouvrage principal (et être présent à la réception des travaux). L’élément d’équipement dissociable installé sur un bâtiment existant relève uniquement de la responsabilité contractuelle de droit commun, sauf s’il est considéré lui-même comme un ouvrage à part entière.

La liste des éléments d’équipement considérés comme « dissociables » peut être longue et diverse : radiateur, volet, interphone, climatiseur, moquette, parquet, système de sonorisation, appareils sanitaires, chaudière dissociable…

Concernant la garantie de ces éléments dissociables, elle peut être de plusieurs formes au regard du Code civil et de la jurisprudence récente :

  • Pour un dommage sur un élément d’équipement dissociable voué à fonctionner (interphone, appareil sanitaire, climatiseur…) : garantie biennale, dite de bon fonctionnement (2 ans) ;
  • Pour un dommage sur un élément d’équipement dissociable inerte (parquet, moquette…) : responsabilité contractuelle de droit commun (5 ans) ;
  • Pour un dommage sur un élément d’équipement dissociable, voué à fonctionner ou inerte, entraînant l’impropriété à destination de l’ouvrage dans son ensemble : garantie décennale (10 ans).

Actualité postée le 29 novembre 2019 et mise à jour le 21 février 2020 dans la rubrique ActualitésActualités de la responsabilité décennale.

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